Montségur, la mémoire et la rumeur

Montagne inspirée, roc tragique, Golgotha de la patrie pyrénéenne, château du Graal, zodiaque de pierre, temple de la lumière… Face à Montségur, poètes, romanciers et « philosophes » en tous genres ont eu l’imagination débordante, eux qui, selon le temps, transformèrent le lieu en Monsalvat wagnérien bastion du néopaganisme face au judéo-christianisme honni, en centre de géographie sidérale, en lieu de rencontres ésotériques, en symbole de revendication politique occitane… et lui donnèrent une telle célébrité qu’on finit bien évidemment par l’utiliser dans la publicité la plus commerciale et par faire de Montségur un fromage…

L’histoire vraie fut pourtant la plus belle. Elle eut la beauté pure de la foi et celle de la tragédie. L’Eglise interdite eut bien là « son siège et sa tête », là durant des années prêcha Guilhabert de Castres, de là partaient les prédicants qui se répandaient à travers les terres languedociennes au péril de la clandestinité, là on venait recevoir la bénédiction des Parfaits, là vécurent Corba et Esclarmonde et leurs sœurs et leurs frères avec Dieu dans le cœur. Et c’est là aussi qu’un jour de mars s’élevèrent les flammes d’un gigantesque brasier que sept cent cinquante printemps n’ont pas éteint.

Alors, même si le château que l’on voit n’est pas celui des Bons Hommes et des Bonnes Dames mais celui des vainqueurs, même si l’on ne sait si l’humble calelh que l’on sortit un jour de terre éclaira jadis un consolamentum ou la veillée d’un seigneur français, penchons-nous sur Montségur et, au sein de la rumeur que les siècles tissèrent, retrouvons la mémoire… 

Foix, 1994, 354 p.

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